Un dispositif à la croisée des besoins locaux et des espoirs individuels

Le Contrat d’Engagement Jeune (CEJ) est entré en vigueur à l’échelle nationale début 2022. Il s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans (jusqu’à 29 ans pour les personnes en situation de handicap) ni en emploi, ni en formation, ni en études, souvent appelés « NEETs ». Ce dispositif a une ambition forte : ouvrir des parcours adaptés pour chacun, en misant notamment sur l’accès à la formation. Dans le Val-d’Oise, où près de 30 000 jeunes étaient concernés par une situation de décrochage ou de chômage début 2022 selon la DREETS Île-de-France, le CEJ a trouvé un terrain d’action vital.

Mais comment ce contrat parvient-il à dynamiser réellement les parcours de formation ? Quels leviers concrets ? La réalité du terrain, les chiffres et les parcours témoignent d’une transformation en cours.

Le CEJ, concrètement : de l’accompagnement sur-mesure à la formation

Le principe phare du CEJ : sortir du « guichet » unique et des recettes toutes faites. L’accompagnement intensif vise à poser les bases d’un projet professionnel.. et il accorde une place centrale à la formation, qui reste l’une des clés majeures pour décrocher un emploi pérenne ou une première expérience.

  • Un référent unique : chaque jeune est suivi par un conseiller qui s’engage à ses côtés plusieurs heures par semaine, sur 6 à 12 mois.
  • Un diagnostic partagé : compétences, envies, freins, tout est étudié pour bâtir un parcours personnalisé et adapté au marché local.
  • Des actions variées : chaque parcours peut alterner périodes d’immersion en entreprise, ateliers de remobilisation, chantiers éducatifs… mais la formation certifiante ou préqualifiante est systématiquement mise sur la table.

Formation et CEJ dans le Val-d’Oise : chiffres clés et typologies d’actions

Le Val-d’Oise, territoire à la fois urbain et rural, cumule des secteurs en forte tension (logistique, bâtiment, aide à la personne), mais aussi des jeunes éloignés des solutions classiques. Le CEJ joue un rôle d’aiguillon, amenant les jeunes vers la formation quand d’autres dispositifs peinent parfois à les motiver.

  • Près de 6 000 jeunes du Val-d’Oise inscrits dans le CEJ en 2023 (Conseil départemental 95), dont environ 54 % ont intégré au moins une formation dans leur parcours dès la première année.
  • Plus de 300 organismes de formation mobilisés localement, couvrant aussi bien les formations courtes que les titres professionnels.
  • 67 % des jeunes accompagnés jugent que leur accès à une formation aurait été bien plus difficile sans le CEJ (source : enquête Mission locale du Val-d'Oise, juin 2023).

En pratique, le CEJ oriente les jeunes vers :

  • Des préparations linguistiques (Français Langue Étrangère, remise à niveau pour l’apprentissage ou l’accès à certains métiers)
  • Des certificats numériques, métiers du digital, TOSA, PIX…
  • Des formations courtes liées à l’emploi local (CACES, Agent de collecte, Petite enfance, Agent de sécurité…)
  • Des prépa-apprentissage ou prépa-compétences pour celles et ceux qui doutent de leur secteur ou qui visent une alternance

L’objectif n’est pas de produire une formation « par défaut », mais de faire du construire ensemble. Beaucoup de jeunes témoignent que, sans l’effet d’entraînement du CEJ, ils n’auraient pas franchi le pas d’une formation.

Des parcours personnalisés : l’exemple de quelques réussites locales

Les témoignages du Val-d’Oise illustrent la capacité du CEJ à ouvrir vers la formation même dans des cas complexes. Quelques exemples types :

  1. Anaïs, 21 ans, Garges-lès-Gonesse Après deux ans d’errance et plusieurs refus d’entrées en formation, le suivi dans le cadre du CEJ a permis de sécuriser un projet de CAP Accompagnant Educatif Petite Enfance. Elle raconte que l’intégration dans une « promo CEJ » au centre de formation lui a permis de tenir le rythme et de valider son diplôme.
  2. Youssef, 19 ans, Cergy Intéressé par la logistique mais n’ayant pas le permis, il a profité du CEJ pour passer le CACES puis obtenir un contrat en alternance. Son conseiller CEJ a également pu trouver une bourse de la région pour financer une remise à niveau en mathématiques.
  3. Maryam, 24 ans, Argenteuil Après un décrochage scolaire et un manque de confiance en elle, la réflexion sur les métiers via des ateliers collectifs CEJ et une simulation d’entretien ont permis de l’orienter vers un titre professionnel d’agent administratif, obtenu en 2023.

Tous évoquent le rôle clé du lien entre leur conseiller CEJ et le centre de formation. Ce partenariat évite de nombreux décrochages et permet de contourner des freins (manque d’information, peur de l’échec, financiarisation).

Un tremplin vers des formations adaptées à la réalité économique du Val-d’Oise

La grande force du CEJ, c’est de relier les jeunes aux besoins réels des entreprises du Val-d’Oise. Les conseillers CEJ travaillent en réseau avec les acteurs économiques locaux, les branches professionnelles et les organismes de formation. Cela permet :

  • De proposer rapidement les formations les plus utiles, en s’appuyant sur le tissu local (formation transport-logistique avec AFTRAL, parcours numériques avec Simplon, dispositifs santé-social avec l'IRTS ou l’Ifas…)
  • D'élargir les perspectives : mise en place de stages, d’immersion, entretien avec des pros pour valider son projet
  • De repérer des métiers qui recrutent : BTP, logistique, agriculture urbaine, métiers verts, numérique

Le dernier baromètre régional de Pôle emploi (2023) a recensé plus de 14 000 projets de recrutements dans le Val-d’Oise, dont la moitié sur des métiers accessibles avec une formation courte. Le CEJ, par sa réactivité, permet aux jeunes d’arriver dans les bons créneaux.

Un accompagnement global : lever les freins périphériques à la formation

L’accès à la formation n’est pas qu’une question de motivation ou d’orientation. Pour beaucoup, les principaux freins sont :

  • La mobilité (manque de transport, pas de permis)
  • Le coût de la vie pendant la formation
  • La garde d’enfants pour les jeunes parents
  • Les freins de santé ou d’accès aux droits

Le CEJ permet de mobiliser toute une gamme d’aides locales et régionales (bourses, cartes de transport, aide au permis), en lien avec les collectiivtés, la CAF ou la Région. Sur le terrain, la prise en charge d’une partie des repas ou l’aide à la garde d’enfant facilite grandement le maintien en formation.

Une dynamique collective et partenariale : tous mobilisés pour la formation

Le CEJ n’existe pas sans une solide dynamique de territoire : mission locale, Pôle emploi, Conseil départemental, Région Île-de-France, organismes de formation, entreprises, associations… Cette alliance est irremplaçable pour :

  • Proposer des parcours sur mesure
  • Favoriser l’accès aux formations qualifiantes ou en alternance
  • Rendre visible les opportunités de formation dans les secteurs en tension
Acteur Rôle dans le CEJ Formation proposée
Mission locale Accompagnement et orientation Formations métier, préqualification
Pôle emploi Financement et suivi Formations courtes, POEI, AFPR
Organismes de formation Animation de parcours Titre pro, certificat, remise à niveau
Entreprises locales Immersion, alternance Formations internes, validation terrain

C’est cette dynamique qui fait la différence, là où certaines situations avaient échoué auparavant.

Regards vers l’avenir : les enjeux pour continuer à ouvrir la voie

Les premiers bilans du CEJ montrent un impact réel sur l’accès à la formation et l’insertion des jeunes en Val-d’Oise (DREETS, Conseil Régional, Missions Locales). Pour que cette dynamique continue, plusieurs leviers se dégagent :

  • Renforcer la notoriété du CEJ auprès des jeunes et des familles, pour éviter les « invisibles »
  • Continuer à développer de nouvelles formations en phase avec les mutations économiques (métiers de la transition écologique, numérique, santé…)
  • Multiplier les passerelles entre formation et premiers contrats (alternance, stages, POE)
  • Mieux accompagner les jeunes en situation de handicap ou les jeunes réfugiés vers les formations adaptées

Chaque jeune, chaque famille, chaque acteur local est invité à participer à cette dynamique, à se saisir des outils existants et à les faire connaître autour de soi. Parce qu’ouvrir une porte vers la formation, c’est bien souvent ouvrir un chemin durable vers l’autonomie.

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